Avez vous lu le rapport « Innovating Pedagogy 2014 » ?

C’est maintenant le troisième rapport que les chercheurs anglais de l’Open University nous proposent faisant la synthèse des tendances dans les innovations pédagogiques. Il est intéressant de voir l’évolution de leurs travaux. Il y a à la fois une dimension feuille de route et un travail de fond sur les tendances pédagogiques.

Le mot clé cette année encore est « social ». Ainsi les MOOC deviennent selon eux des « Massive Open Social Learning ». Derrière cette reformulation, il y a une idée, à savoir la personnalisation, qui est avant tout de donner aux apprenants le pouvoir de choisir quoi et comment apprendre et que l’enseignement s’adapte à l’apprenant. Il y a également une question, qui est : quelles sont les pédagogies qui s’améliorent quand on augmente le nombre de participants (dit autrement qui passent à l’échelle).

Ces aspects sociaux se retrouvent dans les questionnements propos des données à recueillir pour la deuxième entrée de ce rapport : « conception des apprentissages guidée par les données ». Quelles sont les bonnes données et les outils pour les analyser. Clairement, nous en sommes au tout début pour trouver les bonnes métriques.

Si ces 2 entrées sont des mises à jour du rapport Les 8 autres entrées sont nouvelles. On y trouve des éléments déjà présentés par ailleurs : Flipped classroom, BYOD (Apportez vos Appareils Numériques), qui reconnaissent une certaine autonomie aux étudiants et promeuvent plus d’interactions entre pairs. On trouve également comme entrée, l’apprentissage au travers d’événement (event-based learning). C’est une reconnaissance de l’importance des événements participatifs qui fleurissent autour des tiers-lieux, des fablabs, comme les startup weekends ou autres MOOCamps.

On voit également des fondements pédagogiques apparaître, qui démontrent bien la prise d’autonomie et la collaboration. Ces trois points se positionnent dans le processus d’apprentissage. De manière générique, nous trouvons la notion de « apprendre à apprendre », l’idée est bien d’encourager une double boucle, d’apprentissage et de démarche réflexive pour permettre aux apPrenants de développer leur auto-détermination. L’entrée « learning through storytelling » propose ainsi une modalité. La question du « dynamic assesment » ou évaluation dynamique, aborde ainsi l’évaluation non pas sur la question de la maîtrise des connaissances, mais sur la détermination des potentialités d’apprentissage, pour permettre de définir les parcours futurs. C’est un changement de perspective intéressant, élargissant la potentialité de l’évaluation formative.

Autre élément clé que nos collègues ont choisi de mettre en avant, l’idée des concepts en rupture (tentative de traduction de « threshold concept »). Ces concepts, comme la récursion en informatique, la question de la respiration d’un muscle, …, sont des changements de modèles de compréhension, donc des barrières d’apprentissage. Ils sont souvent identifiés dans les disciplines. La proposition est donc d’intégrer dans la conception des formations ces pivots de l’apprentissage. Leur analyse est qu’il y a actuellement un mouvement pour partager et discuter ces concepts d’une part et de les intégrer dans les curriculums d’autre part.

Leur dernière tendance m’a fait particulièrement plaisir, mettant à l’honneur le bricolage, au sens de Levy-Strauss, bien sûr. Leur première acception est dans la démarche d’apprentissage au travers d’une certaine improvisation, source de pratique et de créativité. Leur seconde acception renvoie à une démarche d’innovation pédagogique, que je revendique, basée sur l’expérimentation, la combinaison, le détournement, l’essai-erreur. Source de rupture, c’est une réelle démarche de rupture en phase avec la culture numérique qui est bien le moteur de l’innovation pédagogique actuellement.

Source du schéma : projet beyond prototypes

3 Réponses to “Avez vous lu le rapport « Innovating Pedagogy 2014 » ?”

  1. Yves Epelboin Says:

    En dehors des aspects techniques (BYOD…) je ne vois rien de nouveau. Apprendre à apprendre, par exemple, je l’employais avec mes étudiants pour leur expliquer un des buts de l’enseignement universitaire alors que le PC était encore balbutiant. Et il ne faut pas faire de moi un précurseur : relis les conclusions de Feynman dans son cours d’introduction à la physique. Ca date des années 68 !

    Je trouve que les technologies sont un bon cautère pour permettre à beaucoup les questions qu’on se posait déjà il y a une génération. Rien de neuf au royaume de Danemark ?

    En résumé les nouvelles technologies ne devraient pas devenir une façon pour un tas de gugusses de se faire passer pour de nouveaux pionniers. Elles méritent mieux.

    • Jean-Marie Gilliot Says:

      Je te trouve bien dur sur ce point. La question n’est pas tant de savoir si c’est nouveau, que de voir si cela fait sens aujourd’hui dans le contexte. Pour moi la lecture est plutôt, qu’est ce qui devient plus pertinent dans un contexte web, social, (quelles sont les éléments pédagogiques qui passent à l’échelle). Evidemment on revisite un certain nombre de fondamentaux, et on les considère à l’aune d’une culture numérique qui est bien entendu ancrée dans l’existant mais qui le réinterprète. C’est l’essence même du bricolage, qui fait qu’il n’y a rien de nouveau dans le web, sinon qu’il change notre manière d’aborder le monde.

  2. « Innovating pedagogy 2014″ où comment un rapport anglais, Jean-Marie Gilliot et Levy-Strauss me remontent le moral sans le savoir | Tice en formation Says:

    […] HTML5, je tombe tout à fait par hasard sur le billet de blog de Jean-Marie Gilliot : « Avez-vous lu le rapport « Innovating Pedagogy 2014« . Malgré le titre qui m’ interpelle je me retiens de cliquer sur le lien du […]


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